Antibiorésistance : le projet PHAG-ONE reçoit 2,85M€

Le projet PHAG-ONE reçoit 2,85 M€ pour développer des virus capables d’éradiquer les bactéries résistantes aux antibiotiques pour traiter les patients en impasse thérapeutique.

Le projet PHAG-ONE qui fait partie des 11 projets retenus dans le cadre de l’appel à projets « Antibiorésistance : comprendre, innover, agir » financé par l’Agence Nationale de Recherche (ANR) dans le cadre du PEPR Antibiorésistance piloté par l’Inserm.

Comme en virologie avec le SARS-CoV2, la communauté médicale fait actuellement face à la diffusion rapide à l’échelle mondiale de bactéries qui présentent, en plus de leur virulence, une multi-résistance aux antibiotiques. Ce phénomène touche la quasi-totalité des grandes familles de pathogènes. En cas d’infection avec ce type de bactérie, il n’est pas exceptionnel de se retrouver face à des impasses de traitement, avec des patients pour lesquels aucune antibiothérapie n’est active.

La recherche d’alternatives thérapeutiques dans le domaine des antibactériens constitue donc un enjeu majeur de santé publique et a été identifiée comme une priorité, aussi bien au niveau national, qu’international. Dans la continuité du plan d’action mondial pour combattre la résistance aux antimicrobiens adopté par l’OMS en 2015 et de la publication en novembre 2016, de la feuille de route interministérielle pour la maîtrise de l’antibiorésistance en France, le gouvernement a décidé de mettre en place un programme prioritaire de recherche (PPR) sur l’antibiorésistance, doté de 40 M€ sur dix ans. L’objectif de cet appel à projets est de stimuler, promouvoir et accompagner l’émergence d’innovations diagnostiques, préventives et thérapeutiques et d’aboutir à un meilleur usage des antibiotiques.

A ce titre, les HCL ont obtenu un financement de 2,85 M€ pour le projet PHAG-ONE dédié à la phagothérapie, traitement qui utilise des virus, appelés bactériophages, capables de s’attaquer spécifiquement aux bactéries et de les détruire avec une totale innocuité pour les cellules humaines.

La naissance du projet PHAGEinLYON

Découverts à Paris il y a 100 ans par Félix d'Hérelle, les phages sont absents de la pharmacopée européenne et ont été délaissés en raison de l'avènement des antibiotiques, jugés plus faciles d’utilisation et plus efficaces. Néanmoins, de plus en plus de patients présentent des infections liées à des bactéries multi-résistantes ; pour certains, plus aucun antibiotique n’est actif.

Au sein des Hospices Civils de Lyon, le Centre de Référence des Infections Ostéo-Articulaires complexes (CRIOAc Lyon) a fait ce constat alarmant sur des infections de prothèses de genou et de hanche. Même en l’absence d’antibiorésistance, ces infections particulièrement difficiles à contrôler peuvent devenir chroniques malgré les traitements antibiotiques, avec de très graves répercussions sur la qualité de vie des patients : invalidité partielle ou totale, perte d’autonomie, perte de lien social et de repères sociétaux, amputation du membre atteint voire décès des suites d’une septicémie. Ces problématiques se retrouvant dans de nombreuses autres infections, une équipe multidisciplinaire lyonnaise s’est fixée comme objectif de répondre à ce qui tend à devenir une question majeure de santé publique en proposant une alternative aux antibiotiques : la phagothérapie via le programme PHAGEinLYON et aujourd’hui au travers du projet PHAG-ONE.

Développer des virus pour combattre les bactéries : le programme PHAGEinLYON

Porté depuis 2017 à l’hôpital de la Croix-Rousse par le Pr Frédéric LAURENT (microbiologiste et Chef de service de Bactériologie au sein de l’Institut des Agents Infectieux) et le Pr Tristan FERRY (infectiologue et Chef de service adjoint du service des Maladies Infectieuses et Tropicales), le programme PHAGEinLYON s’est donnée pour objectif depuis 4 ans de développer en France l’accès à la phagothérapie.

En amont du projet PHAG-ONE, ce programme pilote et innovant, sans équivalent en France, a d’abord bénéficié d’un fonds d’amorçage de la Fondation HCL, grâce au soutien de nombreux mécènes régionaux. Les avancées réalisées au sein des HCL ont permis à ce jour de traiter 26 patients uniquement dans un cadre compassionnel sous la supervision de l’ANSM avec les rares phages disponibles en France, d’initier l’isolement et la caractérisation de nouveaux phages dans l’environnement et d’en tester l’activité.

« Le soutien des HCL et de la Fondation HCL au programme PHAGEinLYON, que nous portons depuis plusieurs années et dans lequel s’intègre le projet PHAG-ONE, a joué un rôle pivot dans son succès en permettant de traiter les premiers patients, de mettre en place les outils de criblage et d’évaluation de l’activité des nouveaux phages que nous isolons chaque mois », explique le Pr F. LAURENT.

Désormais, l’ambition du projet ANR PHAG-ONE est de passer à la vitesse supérieure en réalisant au sein des HCL l’isolement, la production, la purification, le conditionnement et les contrôles de qualité de phages thérapeutiques académiques actifs sur 3 espèces (Staphylococcus aureus, Staphylococcus epidermidis et Escherichia coli) et remplissant toutes les exigences règlementaires des tutelles et autorités de santé pour une utilisation chez l’homme. Les phages thérapeutiques produits, seront ensuite utilisés pour traiter les infections à bactéries multi-résistantes aux antibiotiques, dans un cadre compassionnel et dans le cadre d’essais cliniques.

Le projet piloté par les Hospices Civils de Lyon, en lien avec l’Université Claude Bernard Lyon 1 et le Centre International de Recherche en Infectiologie, associe plusieurs institutions au-delà de la métropole lyonnaise : le CEA de Grenoble, des équipes Inserm et CNRS de Montpellier, Paris-Saclay, Versailles-Saint Quentin et Bordeaux.

Les objectifs du projet PHAG-ONE

  • Exploiter la capacité naturelle des virus bactériophages à détruire des bactéries pour apporter une solution innovante de traitement aux patients en échec thérapeutique.
  • Assurer la recherche dans l’environnement puis l’isolement, la production et la purification de phages thérapeutiques ciblant les espèces bactériennes les plus fréquemment impliquées dans les infections résistantes aux antibiotiques (notamment le groupe ESKAPE défini par l’OMS).
  • Réaliser le conditionnement et l’ensemble des contrôles de qualité requis pour répondre aux exigences des autorités de santé dans le cadre d’une utilisation chez l’homme.
  • Mener des études de cohortes et des essais cliniques visant à optimiser l’utilisation et l’efficacité des phages afin de contrôler, voire d’éradiquer ces infections, et in fine améliorer la qualité de vie et les chances de survie des patients.
  • Créer à terme, à Lyon, un Etablissement Français du Phage capable de fournir l’ensemble des hôpitaux français en bactériophages pour traiter les patients en impasse thérapeutique.

Ce projet bénéficiera au sein des HCL des expertises microbiologiques, technologiques, pharmacologiques pharmaceutiques, et cliniques d’équipes hospitalo-universitaires expérimentées et reconnues dans les domaines de la prise en charge clinique, des phages et de la production de médicaments. Comme l’a démontré récemment la rapide mise en place, par la plateforme FRI-PHARM implantée à la Pharmacie de l’hôpital Edouard Herriot, d’une production académique de curares pour faire face à la pénurie pendant la crise sanitaire liée à la COVID-19, les HCL disposent d’une maîtrise de la conception, du développement et de la fabrication de traitements innovants.

L’originalité du projet PHAG-ONE est son caractère intégré au sein d’une seule et même institution hospitalière, mais aussi sa nature académique, utilisant des structures déjà existantes permettant d’envisager une mise à disposition de phages à des coûts maitrisés et la création d’une plateforme nationale de production de phages thérapeutiques. Au-delà, des patients atteints d’infections osseuses pris en charges dans le CRIOAc de Lyon mais aussi dans l’ensemble des 8 CRIOAc en France, le projet PHAG-ONE ouvre une nouvelle aire des traitements anti-infectieux avec des utilisations possibles, à termes, dans d’autres indications pour l’ensemble de la communauté médicale française.

 

 

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