Santé mentale et crise environnementale : trois publications des HCL explorent l’impact de l’éco-anxiété chez les jeunes
Ces travaux, visant à mieux comprendre la notion d’éco-anxiété chez les jeunes et à en préciser les implications cliniques, sociales et expérientielles, ont été menés aux Hospices Civils de Lyon au sein du service de psychopathologie du développement de l'enfant et de l'adolescent, sous l’égide du Pr Pierre Fourneret, du Dr Christophe Gauld et du Dr Apolline Lerolle, praticiens en pédopsychiatrie. Les équipes de l’Université de Bordeaux et de l’Université de Louvain (Belgique) ont également participé à ces études,
Une première étude quantitative (CPP 2020-A02920-39) a été conduite auprès de 87 adolescents hospitalisés en pédopsychiatrie, afin d’examiner l’éventuelle corrélation entre éco-anxiété et risque suicidaire. Les résultats indiquent une association certes significative dans les analyses univariées, mais sans significativité après ajustement pour l’anxiété et la dépression. Le fait que l’éco-anxiété ne soit pas associée de manière autonome au risque suicidaire chez les adolescents souligne l’importance de ne pas surmédicaliser une expérience qui relève peut-être davantage d’un rapport lucide et inquiet au monde que d’un « trouble » psychopathologique. L’éco-anxiété constituerait en effet une condition qui dépasserait le cadre de la pratique pédopsychiatrique pour toucher à des enjeux sociaux et citoyens de nos jeunes.
> lire la publication ici
Dans le but de clarifier le statut de l’éco-anxiété, pathologique ou non, une seconde contribution, d’ordre théorique, cherchait à proposer une définition rigoureuse de l’éco-anxiété, en articulant trois critères : sa nature en tant qu’elle est une forme de détresse liée à la conscience des atteintes environnementales, son impact sur les capacités d’agir des jeunes, et son inscription plus large dans des contextes sociaux, générationnels et affectifs. Ce travail fournit un cadre conceptuel nécessaire pour que les cliniciens, chercheurs et acteurs de santé publique puissent mieux distinguer ce qui relève d’une inquiétude dite « normative » face à un environnement en souffrance, pouvant conduire à un engagement écologique, d’une détresse psychique appelant une attention thérapeutique.
> lire la publication ici
Enfin, une troisième publication, davantage qualitative, proposait un cadre conceptuel pour penser l’articulation entre psychiatrie et environnement. Elle introduisait de manière originale la notion de « psychiatrie environnementale » comme champ interdisciplinaire intégrant cinq sous-domaines : la psychiatrie transculturelle (centrée sur les significations culturelles du trouble), la psychiatrie globale (portée par les enjeux d’équité et de justice sociale en santé mentale), la psychiatrie exposomique (analysant les expositions environnementales à grande échelle), la psychiatrie écologique (portant sur la détresse face à la crise environnementale), et enfin la psychiatrie One Health (qui relie santé mentale, santé animale et santé des écosystèmes). Ce cadre vise à enrichir la compréhension des troubles au-delà des déterminants strictement biologiques, en intégrant les dimensions culturelles, sociales, écologiques et politiques. Il ouvre ainsi la voie à une pédopsychiatrie plus sensible aux vulnérabilités contemporaines et aux transformations globales. De plus, un tel cadre pourrait être transposé à d’autres disciplines de santé, en dessinant un programme de recherche qui articule clinique, éthique, et écologie dans une perspective transdisciplinaire.
> lire la publication ici
L’ensemble de cette dynamique s’inscrit dans le cadre de la Grande Cause nationale 2025 « Santé mentale des jeunes », et fait écho aux engagements RSE des Hospices Civils de Lyon. Elle souligne la nécessité d’organiser une réflexion à la fois académique et clinique sur les enjeux écologiques actuels, invitant à imaginer différentes formes de soin, attentives à l’environnement, aux générations à venir et à la pluralité des sensibilités psychiques.
« Nous avons voulu interroger, empiriquement, un sujet très présent dans les médias, mais paradoxalement peu documenté en psychiatrie de l’enfant et adolescent. L’éco-anxiété existe chez les jeunes, mais elle ne doit pas être assimilée trop rapidement à une pathologie ; il faut écouter ces émotions sans les médicaliser de manière excessive » Christophe Gauld, pédopsychiatre à l’Hôpital Femme Mère Enfant.